Joseph George Navarro (1881-1947) avait une sérieuse expérience de la conception d’aéroplanes avant même la Première Guerre mondiale.
En 1929, au sein de sa société Navarro Safety Aircraft Ltd., à Heston Air Park, Middlesex, Il conçut le "JGN Type 34" Chief, un appareil très original qui semble avoir volé en mars 1931.
https://en.wikipedia.org/wiki/Navarro_Chief
https://www.worthpoint.com/worthopedia/vintage-aircraft-brochure-navarro-427082843
Ce prototype triplace qui n’aura pas révolutionné lui non plus l’Histoire de l’aviation, comportait tout de même bien des particularités amusantes.
http://aviadejavu.ru/Site/Crafts/Craft34399.htm
https://www.secretprojects.co.uk/threads/navarro-safety-aircraft-%C2%AB-chief-%C2%BB-3-seater-saloon-monoplane-1931.18551/
Un appareil motorisé avec trois petits ABC Scorpion https://en.wikipedia.org/wiki/ABC_Scorpion pour la ʺsécurité en cas de panneʺ, plutôt qu’un seul moteur d’une centaine de chevaux par exemple, c’est déjà un choix particulier.
Et pour la cellule, on notera une fois de plus que la hantise du dérapage et de la vrille était toujours dans les têtes à cette époque.
La gouverne de profondeur (pour cet appareil, on pourrait dire les gouvernes séparées) était couplée avec les ailerons, ce qui, avec les connaissances d’aujourd’hui, n’était probablement pas une bonne idée.
Braquer le manche à l’opposé de la vrille ne fait qu’augmenter l’incidence sur l’aile intérieure, et c’est justement une action pro-vrille. Les demi-gouvernes de profondeur agissant dans le même sens que les ailerons, même avec une ligne de charnière orientée d’une façon spéciale, risquaient peut-être même de rendre l’avion incontrôlable.
On le sait, la méthode ayant fait ses preuves consiste dans ce cas à contrer à fond la rotation aux palonniers, et à ʺrendre la mainʺ en agissant sur la gouverne de profondeur pour diminuer l’incidence, tout en gardant les ailerons au neutre. Mais dans le cas de notre oiseau, la gouverne de profondeur était déjà occupée à autre chose, et la gouverne de direction s’ouvrait aussi pour servir d’aérofrein !
Pour des véritables AF, il fallut d’ailleurs attendre quelques années de plus pour leur mise au point à l’institut allemand DFS, avec d’ailleurs une influence faible sur la vitesse, mais forte sur le taux de chute.
Quant à la prévention anti-vrille, malgré les démonstrations bien antérieures de Ferdinand Ferber, et malgré les recommandations notamment de Jacques Lecarme du CEMA Villacoublay, dès les années 30 (voir l’histoire des essais en vol de Louis Bonte), pour sortir de ces hantises, il fallut attendre la fin de la mode -tenace pour certains- des centrages très arrières et des gouvernes minuscules avec en particulier des dérives bien trop petites.
Les ailes de notre Chief étaient dotées d’un dispositif assez original de repliage, et les saumons étaient relevés en espérant limiter le dérapage. Ils font plutôt penser à ce qu’on appelle aujourd’hui des winglets, offrant certes une stabilité de route, mais permettant surtout de réduire les tourbillons marginaux.
Enfin, le train classique, fixe, à large voie, et semblant implanté à peu près au bon endroit, était équipé de petits garde-boue, sensés limiter les projections sur les capots moteurs implantés juste au-dessus.
Mais l’allure générale de l’appareil, avec les pauvres 40 Kg du moteur avant, laisse penser que le constructeur avait des soucis à se faire pour les centrages sur cet avion triplace en tandem. Cet appareil pouvait probablement, lui aussi, se retrouver centré trop en arrière, ce qui au final, bien sûr, ne va pas dans le sens de la prévention recherchée.
Avis tout personnel qui accepterait volontiers d’être contredit.
On sent tout de même que Navarro a mobilisé beaucoup de matière grise pour cette conception. Il serait intéressant, par exemple, de connaitre la cinématique de toutes les commandes de l’appareil. Le couplement de la profondeur et des ailerons, qui plus est avec des ailes repliables, çà mériterait un petit dessin !
Finalement, cet appareil n’apporta pas la preuve de son efficacité et il fut vendu avec tout le matériel de Navarro Safety Aircraft Ltd. aux enchères publiques à Heston le 3 mai 1932. Le sort final du Navarro Chief est inconnu, perdu dans les profondeurs de la nuit aéronautique…
La carrière du concepteur ne semble pourtant pas s’arrêter là, puisqu’on trouve la trace, juste après la seconde guerre mondiale, de projets divers, notamment de triplaces amphibies portant la signature de Navarro, l’Air Coupe et le Naïad, qui furent très probablement ses ultimes réalisations.
http://aviadejavu.ru/Site/Crafts/Craft35134.htm
https://www.secretprojects.co.uk/threads/navarro-naiad-amphibian.17571/
