Fi 103 V1 REICHENBERG
En 1944 quelques pilotes de planeurs de transport qui étaient utilisés pour le ravitaillement de « poches », pensent qu’ils seraient plus utiles à piloter des planeurs chargés d’explosifs qui pourraient causer des dégâts à l’ennemi. Ce sera le projet « engagement total ». Les Allemands n’ont pas développé d’engins destinés au suicide du pilote comme les Japonais avec leur Baka, aussi ils vont tâtonner en direction de plusieurs projets :
1.- Sur instruction du général Korten, chef d’état-major de la Luftwaffe, un groupe de 70 hommes est choisi et affectés au KG200.Ils sont envoyés en formation de pilote sur des planeurs du type « Grünau-baby » et « Stummelhabicht ». Ce dernier en piqué pouvait atteindre la vitesse de 300 km/h. Ils s’entraînent pour des missions « avec des chances » ou « sans aucune chance ». Cette dernière impliquant la mort du pilote aux commandes de son planeur explosif.
Le 2 Mars 1944 les exigences techniques d’une « bombe planante montée » furent définies. Entre autres :
A.-But : Destruction certaine d’objectifs ennemis de haute valeur (navires de guerre, barrages, centrales électriques etc.…)
B.- Genre d’emploi : Amenée sur l’objectif par avion de combat. Après largage de la bombe, pilotage de celle-ci par l’homme de « l’engagement total » couché dans la bombe.
C.- Caractéristiques de vol : Analogues à un bon appareil de vol à voile. Suffisamment de maniabilité pour pouvoir suivre les manœuvres d’esquive de l’objectif. Vitesse normale élevée afin de traverser rapidement les zones de tir DCA
Et de nombreuses autres touchant au transport, à l’équipement, au type d’explosif, instruction du pilote. Ce document intéressant est signé par un dénommé Heigl colonel commandant d’escadre.
Dans les bureaux de recherche tous secouèrent la tête en lisant cet ordre qui émanait visiblement d’un homme qui n’y connaissait rien.
Des essais sont entrepris à Hörshing prés de Linz par Hanna Reitsch et Heinz Kensche avec un Me 328 engin doté d’ailes très courtes, d’une vitesse en piqué de 750 km/h. Cet engin était emporté à « califourchon » sur le dos d’un Do 217 jusqu’à 6000 mètres d’altitude. Les essais se terminèrent en avril 1944 et le Me 328 devait être construit en série. Toutefois ce projet fut enterré sans suites.
La SS d’Himmler va entrer en jeu et prendre l’affaire en main. Aux 70 hommes déjà à l’entraînement vont s’adjoindre 30 hommes des unités de Skorzeny. Très rapidement le projet « Reichenberg » va prendre corps. En un temps record un V1 est transformé pour accueillir un pilote à Ainring prés de Bad Reichenhall. D’abord sans moteur, l’engin est emmené à son altitude largage sur le dos d’un He 111.
D’autres essais se poursuivent parallèlement à Rechlin, toujours sans moteur. Quelques hommes perdent la vie lors d’accidents en vol. Hanna Reitsch va faire avancer rapidement les essais et rendre la « Reichenberg » fiable. Hanna Reitsch n’eut pas d’accident à bord de cet engin, comme faussement prétendu. Elle va effectuer deux atterrissages d’urgence avec la version sans moteur. Le seul accident qu’elle eut se passa lors d’un vol d’essai avec un Me 163 (avion fusée). Le dispositif de largage du train ne fonctionna pas et elle dut atterrir avec le train ce qui occasionna une perte de vitesse (le flux des gouvernes étant masqué par le chassis de train). L’avion s’écrasa en seuil de piste avec la « grâce d’un piano tombant d’un troisième étage ».
Les essais du modèle sans moteur étant terminés, deux machines furent construites. Un modèle à une place (Reichenberg III), et un modèle à deux places pour l’instruction (Reichenberg II). Le modèle final Reichenberg IV était un engin de 2.25 tonnes, charge militaire de 800 kg, rayons d’action du moteur après largage de l’avion porteur : 300 km pouvant être assemblé en 280 heures de travail.
Les pilotes étaient informés qu’ils pouvaient quitter l’appareil et sauter en parachute. Cette affirmation était purement gratuite car compte tenu de l’exiguïté du poste de pilotage, le pilote affublé de sa combinaison de vol (il n’y avait pas de chauffage) et de son parachute, il lui était impossible de s’extraire de l’engin avant l’impact, alors que la vitesse avoisinait 800 km/h. D’autre part, en vol cet engin était plus lent que les chasseurs ennemis qui pouvaient l’abattre facilement. Les chances pour un volontaire d’atteindre le but fixé étaient nulles. Les calculs faits à ce sujet donne une chance sur 100 au pilote de pouvoir sauver sa vie.
Lorsque Himmler songeât à enrôler des candidats au suicide, des malades ou des criminels, ce fut la goutte d’eau qui fit déborder le vase. Une entrevue orageuse en présence de Göring, de Storp, Pfelz d’une part, et Knemeyer et Baumbach du KG200 d’autre part détermina « qu’engager du monde dans de telles conditions n’était rien moins que criminel ».
Le projet fut enterré.