le Heinkel "Julia" et le Bachem "Natter" étaient des missiles antiaériens que chevauchait un pilote censé les conduire jusqu'à la cible. Le Fi-103 "Reichenberg" était une bombe volante V1 dans laquelle on avait installé un pilote afin de pallier le dramatique manque de précision de l'engin.
Encore plus extrême, et relevant carrément de la folie furieuse, le projet EWN-4 était, grosso-modo, une fusée V2 munie d'ailes et surmontée d'un pilote.
A l'instar de la V1 et de toutes les fusées et avions sans pilote essayés à l'époque, la V2 ordinaire souffrait elle aussi d'une imprécision telle qu'elle la condamnait au seul bombardement d'objectifs de grandes dimensions - autrement dit, des villes - sans réelle valeur militaire.
Il était évident que les recherches accomplies dans les domaines de l'électronique et de l'autoguidage finiraient, à terme, par répondre aux voeux des militaires. Le problème, c'est que ces recherches n'avaient aucune chance d'aboutir avant la fin de la guerre. Pourquoi, dès lors ne pas tenter, là encore, d'installer dans le nez de l'engin un pilote qui le guiderait jusqu'à la cible, puis s'en éjecterait - du moins l'espérait-on - d'une façon ou d'une autre juste avant l'impact (1)
Mais de la théorie à la pratique, il y avait plus qu'un abîme...
En supposant-même que "l'homme-missile" - en fait un véritable astronaute en combinaison spatiale, dans sa cabine blindée - puisse survivre au décollage ainsi qu'aux formidables accélérations, vitesses et altitudes atteintes par le projectile - ce qui n'avait rien d'évident - encore fallait-il qu'il se retrouve ensuite en mesure de piloter l'engin dans la dernière phase du vol, tâche impossible avec les seules minuscules dérives dont étaient équipées les V2 originelles.
Il était donc indispensable de greffer des moignons d'ailes sur l'engin, ce qui, au demeurant, permettrait également d'améliorer ses qualités de plané, donc son rayon d'action. Si on lui greffait donc un pilote, mais aussi des ailes, des moteurs plus puissants, et même plusieurs étages, les ingénieurs ne doutaient pas de parvenir, un jour, à lui faire franchir l'Atlantique (!), comblant ainsi les voeux du Führer, lequel réclamait depuis des années de bombarder New-York, ne serait-ce qu'une seule fois et avec un seul appareil.
Cela faisait assurément bien trop de "si" pour un seul engin. Comme il fallait s'y attendre, rien ne pu donc sortir d'une telle formule avant la capitulation allemande, et la V2 pilotée demeura pur fantasme d'ingénieur...
(1) dans "Le Secret de l'Espadon", le dessinateur et scénariste Edgar-Pierre Jacobs a recours a semblable solution pour ses héros Blake et Mortimer
http://diberville.blogspot.com/2006_01_01_diberville_archive.html