je sais on en a parler mais je ne retrouve plus le post
le 13 février 1945, les Britanniques bombardent Dresde, suivis le lendemain par les Américains.
Pour les premiers, c'est évidemment une manière de venger le fait que 180 fusées V1 et V2 - le total le plus important jamais enregistré - se sont abattues sur l'Angleterre cette semaine-là. Pour les seconds, c'est aussi tenir la promesse faite à Staline, quelques jours plus tôt, de paralyser toutes les voies de communication ferroviaire acheminant des renforts allemands vers le front de l'Est.
Des dizaines de milliers de civils allemands vont payer de leur vie cette double logique,... et aussi le fait que plusieurs trains bondés et bloqués en gare centrale ne transportent pas des troupes allemandes en route vers le front - comme l'affirment pourtant les services de renseignement soviétiques - mais bien des milliers de civils allemands, fuyant dans la direction opposée.
A l'énoncé des pertes et destructions, Goebbels, Ministre de la Propagande du Reich entre dans une colère folle et jure d'exécuter autant de prisonniers de guerre anglo-américains qu'il y a de civils allemands tués dans ce bombardement.
Hitler est favorable à l'idée, qui lui permettrait de renier les Conventions de Genève sur les prisonniers de guerre et contraindrait donc les troupes allemandes à se battre jusqu'au bout, sachant le sort qui les attendrait en retour si elles cédaient à la tentation de se rendre
Ce n'est qu'à grand-peine que l'État-major de l'armée parvient à convaincre le Führer d'y renoncer.
Confronté à des soldats allemands qui se battent de plus en plus mollement contre les Anglo-américains à l'Ouest, Goebbels parvient néanmoins à imposer une autre idée, celle d'une sorte de "tourisme des cendres" : tous les soldats allemands ayant de la famille à Dresde se voient accorder des permissions exceptionnelles, dont on espère qu'elles les convaincra, au retour, de combattre avec un désir de vengeance renouvelé....
Ce sera tout le contraire...
dans une guerre totale, les civils sont des combattants à qui l'État rend les honneurs militaires lorsqu'ils tombent sous les bombardements.
Au début de la guerre aérienne, l'Allemagne nazie n'éprouve aucune difficulté à offrir cérémonie officielle, cercueil décent et sépulture individuelle à chaque civil victime des bombes, ainsi que décorations, indemnisations et sympathies personnelles du Führer ou du gauleiter local aux survivants et héritiers.
Mais à partir de la mi-1943, à mesure que les raids se font de plus en plus massifs, et les morts de plus en plus nombreux, il faut en revenir aux fosses communes, aux boîtes en sapin, puis aux sacs de toile que l'on coud simplement autour des cadavres. Il ne s'agit plus d'honorer quelques dizaines de martyrs de la Grande Allemagne, mais bien de faire disparaître au plus vite des milliers et des milliers de corps souvent carbonisés au point d'en être rendus méconnaissables.
A Pforzheim, on doit recourir au lance-flammes pour faire disparaître les 20 000 cadavres que la municipalité est incapable d'enterrer. A Dresde, l'ampleur des destructions impose même l'usage d'une méthode directement héritée du Moyen-Âge.
"Des travailleurs et des prisonniers russes creusèrent des tombes dans les cimetières de Dresde pour dix mille tombés au champ d'honneur. Survint un radoucissement du temps (...) qui accéléra la décomposition. Il ne restait plus d'autre choix (...) que de donner l'autorisation d'incinérer les corps. Cela eut lieu sur l'Altmarkt, où l'on bâtit d'immenses grils avec des poutrelles de fer. Sur chacun d'eux, on disposa environ cinq cents corps les uns sur les autres. On les imprégna d'essence et on y mit le feu"
Par une de ces étranges ironies dont l'Histoire a le secret, les grils, qui brûlèrent pendant cinq semaines, "furent construits avec la participation d'un des commandos de Streibel [le Sturmbahnführer SS Karl Streibel], (...) qui avaient appris cette méthode de crémation à Treblinka. Là bas, on utilisait six rails de chemin de fer sur des socles en béton" (*)
(*) cité par Jorg Friedrich, "L'Incendie", page 394. Les événements de Dresde ont toujours fait l'objet d'innombrables polémiques. Celle relative au nombre de morts ne fait pas exception. On considère aujourd'hui que les pertes humaines, évaluées à bien plus de 100 000 par l'occupant russe au lendemain de la guerre, tournent plutôt aux alentours de 35 000.
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